Il n’y eut pas une, mais deux croisades d’enfants !

Un adolescent allemand, Nicolas, et un jeune Français, Étienne, entraînèrent vers la Terre sainte des milliers d’enfants de France et d’Allemagne qui en rêvaient. La plupart d’entre eux moururent en franchissant les Alpes. Les rescapés atteignirent Gênes, mais il n’y avait aucune flotte pour les transporter. Quelques-uns, qui avaient trouvé des embarcations de fortune, furent capturés par les pirates sarrasins et vendus comme esclaves. Cette histoire, racontée par Albéric de Troisfontaines, un demi-siècle après l’événement, est une légende. La réalité est tout autre. Il y eut en fait deux croisades d’enfants, parties de France et d’Allemagne en juin 1212.

Étienne, jeune berger du village de Cloyes, prétendait avoir eu une vision du Christ qui, sous la forme d’un pèlerin, lui demandait de porter une lettre au roi de France. 30 000 pueri du nord de la France rejoignirent Étienne et ses compagnons à Saint-Denis. Toutefois, le souverain les renvoya tous chez eux. Les sources sont plus prolixes sur l’aventure allemande, mais divergent en de nombreux points. Elles s’accordent au moins pour dire que des milliers de personnes partirent joyeusement pour l’Italie et que très peu en revinrent. Quant au terme pueri, il ne signifiait vraisemblablement pas dans ces cas « enfants », selon la traduction du latin classique, mais désignait sans doute les « enfants de Dieu », sans qu’il fût question d’âge, c’est-à-dire les humbles. Même si effectivement des enfants comptèrent parmi les pèlerins, la plupart des participants furent vraisemblablement des adultes, hommes et femmes, comme en témoignent les sources les plus sérieuses.

Cette croisade n’était plus une guerre sainte, mais un voyage symbolique et pacifique d’indigents vers la Jérusalem céleste où le Christ devait revenir pour le jugement dernier. Dieu n’avait-il pas promis à son peuple que tous ceux qui sont pauvres avec le Christ recevraient un avenir radieux en récompense ? Et puisque Dieu haïssait les riches, ils pouvaient espérer conquérir la Ville sainte, à la suite de quoi le royaume de Dieu serait à eux.

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