Larry Bird est un des meilleurs joueurs ayant jamais joué au basket. Sans aucun doute celui avec la plus grosse intelligence de jeu de l’histoire. Tout au long de sa carrière en NBA, il a démontré qu’on pouvait gagner des matchs (et des titres) sans savoir sauter ni courir vite.
Né en 1956 au beau milieu des champs de l’Indiana, il ne tarde pas à quitter son État natal pour devenir une star du ballon orange. Drafté par les Boston Celtics en 1978 en sixième position, il ne signe son contrat qu’un an plus tard avec la mythique franchise du Massachusetts. À l’époque, l’entraîneur Red Auerbach (l’un des meilleurs coachs de l’histoire) refuse de lui signer un chèque trop important, car il estime « qu’un ailier ne peut pas impacter autant un match qu’un pivot ou un meneur ». Autant le dire tout de suite : il s’est bien trompé sur ce coup-là.
En effet, les premiers pas de Larry dans la Grande Ligue sont magnifiques : au bout de sa première saison, il devient le meilleur scoreur, le meilleur rebondeur et le meilleur intercepteur de l’équipe. Rien que ça. Avec lui, les Celtics gagnent trente-deux matchs de plus que l’année précédente et terminent avec le meilleur bilan de la ligue. Évidemment, Auerbach est bien obligé de reconnaître son erreur et augmente rapidement le prodige venu des champs, tout en lui confiant un rôle de plus en plus important dans l’équipe.
Il en devient d’ailleurs très rapidement le patron. Dans son sillage, la franchise la plus titrée de l’histoire de la NBA glane trois nouveaux titres et renoue avec son glorieux passé des années 60 (onze fois champions sur treize saisons !). Partout aux États-Unis, Larry devient une idole, un modèle que l’on veut imiter. Pas mal pour un joueur sans détente ni qualité physique !
Larry Legend savait gagner sans avoir de gros muscles pour s’imposer près du panier. Il savait comment marquer un panier à trois points sans sauter plus haut que son adversaire. Pour remporter des centaines de ses confrontations, il se basait sur sa science du jeu très développée bien sûr, mais aussi sur sa langue. Et à ce petit jeu, ils ne sont pas beaucoup à le dépasser dans l’art de sortir son adversaire du match juste en lui parlant.
Entre basketteurs, on appelle cela le « Trash-talking » : raconter tout et n’importe quoi pour déconcentrer son opposant direct et prendre le dessus sur lui. Pour Larry, cela commençait dès l’arrivée dans le stade, bien avant le début du match. Il allait trouver son adversaire du jour et lui demandait qui détenait le record du plus grand nombre de points marqués dans la salle. Lorsque son interlocuteur lui demandait le pourquoi de cette question, il répondait tout naturellement : « C’est toi qui vas défendre sur moi, non ? » À peine en tenue de match, la couleur était annoncée. S’il ne vient pas vous perturber avant le premier coup de sifflet, surtout ne lui faites pas de remarque. Clyde Drexler raconte qu’au cours de la saison 1983-1984, lors de son premier affrontement avec Bird, Larry lui a lancé un « Tu ne peux pas défendre sur moi ». Drexler lui rétorque qu’il est trop confiant. Réponse cinglante : « Confiant ? Tu es rookie (joueur dans sa première année en NBA), tu ne sais rien du tout ». Tout cela avant de coller dix points d’affilée sur le pauvre Clyde que son coach finira par sortir du terrain pour le reste de la rencontre. Au passage, Bird n’a pas raté une seule occasion de rire en la regardant dans les yeux lorsqu’il passait devant le banc où se trouvait sa victime du soir.
Des anecdotes comme celle-ci, il y en a des tonnes concernant le numéro 33. On peut également citer son match contre les Pistons de Detroit en 1988 où il est défendu par Dennis Rodman, l’un des meilleurs défenseurs de l’histoire du basket. Toujours aussi arrogant, il crie sans cesse : « Hé, les gars, je suis tout seul ! Passez-moi vite le ballon avant que quelqu’un ne le remarque ! » alors que Rodman ne le lâche pas d’une semelle. Il enfile les paniers comme des perles malgré l’excellente défense de The Worm et se tourne alors vers le coach des Pistons : « Tu devrais sortir ce gars et mettre quelqu’un pour défendre sur moi, car c’est trop facile quand je suis ouvert comme ça ». Que répondre à un joueur qui martyrise votre équipe alors que vos meilleurs éléments sont sur le terrain ? Rien, justement. Larry l’avait bien compris, et ça l’amusait beaucoup.
Une dernière, pour la route : parfois, Bird n’avait même pas besoin d’ouvrir la bouche pour trash-talker l’équipe adverse. En 1986, il se rend à Portland avec ses Celtics. Il déclare avant la rencontre que le basket est trop simple pour lui et que pour pimenter un peu les choses, il jouera l’entièreté du match avec sa mauvaise main, la gauche. Malgré ce handicap, il réalise un triple double en marquant quarante-sept points, prenant quatorze rebonds et réalisant onze passes décisives. Parler autant avant une rencontre et assumer parfaitement dans la foulée, peu l’ont fait. Pour Larry, c’était son quotidien.
Il prend sa retraite sportive en 1992 après avoir remporté l’or aux JO de Barcelone et devient l’entraîneur des Indiana Pacers en 1997. Ce retour aux sources lui réussit plutôt bien puisqu’il est désigné coach de l’année deux ans plus tard. En 2003, il devient même dirigeant de la franchise, avec le même succès.
Au fil des décennies, Larry Bird a tout gagné dans le basketball. Il est la preuve vivante que le succès peut se construire avec de gros biceps, mais aussi avec une tête bien pleine et une langue bien acérée.
Auteur : Arnaud Pitout