Adrienne Bolland est une pilote d’essai et la première femme à avoir survolé les Andes, entre le Chili et l’Argentine. On la qualifie d’aviatrice la plus accomplie de France et elle reçoit, entre autres, la Légion d’honneur pour ses exploits. À sa mort, un timbre est dessiné à son effigie.
Elle naît dans une famille riche, vivant en banlieue parisienne, et se lance dans l’aviation alors qu’elle a à peine 20 ans pour rembourser des dettes de jeu. Elle réalise sa première traversée des Andes lors d’un voyage de son employeur, René Caudron, pour aller présenter des modèles d’avions en Amérique du Sud. Pour cette traversée, elle prétend être assistée par des conseils et des « astuces » d’un médium. Une fois sa carrière terminée, elle s’implique en politique, principalement dans les mouvements de gauche, et s’engage dans la Résistance française.
Adrienne naît à Arcueil, dans la banlieue parisienne, en 1895 et est la plus jeune d’une famille de sept enfants. Ses parents, des émigrés belges, ne lui prêtent pas beaucoup d’attention, ce qui renforce son côté indépendant et lui permet de s’affirmer. Très vite, elle est connue comme la petite terreur au sein du foyer.
Son leitmotiv ? Ne jamais abandonner. Elle est en effet persuadée que personne ne peut changer d’avis. Dans la vie, elle ne cède jamais rien et, le temps passant, cette pulsion la pousse à la fête et aux jeux. Lors d’une soirée particulièrement arrosée, elle perd tout son argent en pari. Elle exprime alors le désir d’être pilote. Un ami lui suggère de postuler chez Caudron, le premier avionneur français, où elle pourra apprendre à voler et être payée pour le faire, ce qui l’aidera à résoudre ses déboires financiers.
Adrienne se rend donc au Crotoy, au siège de Caudron sur le Manche, et s’inscrit à ses premiers cours de pilotage. Une erreur typographique ajoute un second « l » à son nom et c’est dorénavant comme cela qu’elle se fait appeler jusqu’à la fin de sa vie. Elle obtient sa licence en deux mois et, alors qu’on voit en elle un fort potentiel, elle n’hésite pas à se confronter à ses détracteurs, allant parfois jusqu’à se battre. Son caractère bien trempé lui vaut quelques punitions, la plus difficile étant simplement de rester sur terre. Dans un avion, elle reconnaît se sentir petite, humble, alors que sur terre, elle avoue être plus qu’insupportable.
Après l’obtention de sa licence, elle travaille pour René Caudron en allant livrer et récupérer des avions, comme le faisaient tous ses employés. Cependant, elle rêve de piloter son propre avion et soumet son désir à Caudron. Elle repère un G3 et lui dit que si elle parvient à effectuer une boucle avec l’appareil, elle volera à ses commandes. L’exploit réussi, Caudron prend également consciente que le fait d’avoir une si jolie femme aux commandes de ses avions est un très bon moyen pour démontrer qu’il est facile de piloter un avion. Il lui demande alors de traverser la Manche et, sur le chemin, elle fait une escale à Bruxelles pour faire la fête avec ses amis. Le lendemain matin, alors qu’on la croit perdue en mer, elle déclare que si elle s’est noyée, ce n’est pas dans l’eau. Le 25 août 1920, elle traverse la Manche et répète donc l’exploit réalisé par Harriet Quimby en 1912.
René Caudron lui demande donc d’aller faire des vols de démonstration en Argentine et, peu de temps après son arrivée, Adrienne planifie déjà son vol dans les Andes. Le G3 qu’elle utilise à l’époque a été conçu pour faire de l’observation durant la Première Guerre mondiale et n’est donc pas idéal pour un voyage. Elle demande donc à son patron de lui envoyer un autre appareil et voit sa demande être refusée. Le 1er avril 1921, elle décolle finalement de Mendoza pour 40 heures de vol, sans cartes ni connaissances de la région.
La veille, Adrienne reçoit la visite dans sa chambre d’hôtel d’une Brésilienne prétendant être une travailleuse d’origine française, qui n’a jamais vu d’avion de sa vie. Adrienne pense tout de suite que cette dame, très timide, a pour but de la décourager et lui accorde le temps d’une cigarette pour qu’elle dise ce qu’elle avait à dire. La femme lui explique que lorsqu’elle verra un lac en forme d’huître, pendant son vol, elle devra absolument tourner à gauche, vers une montagne qui ressemble à une chaise inversée. Si elle prend vers la droite, elle est certaine de mourir.
Les pilotes tentent de traverser les Andes depuis 1913 et le Congrès national du Chili a offert un prix de 50 000 pesos au premier Chilien qui parviendra à traverser la chaîne entre les 31e et 35e parallèles, là où se trouvent les plus hauts sommets. C’est l’officier de l’armée chilienne, Dagoberto Godoy, qui obtient ce prix en 1918.
Le vol de Bolland est particulièrement périlleux. Le G3 ne peut pas voler plus haut que 4 500 mètres alors que le sommet de la chaîne culmine à 6 959 mètres, à Aconcagua. Elle doit donc voler autour des sommets, au travers des vallées, ce qui rend la route plus compliquée que celle empruntée par Godoy et ses prédécesseurs. Elle bourre sa combinaison de vol ainsi que son pyjama de papier journal, mais cela ne lui tient malheureusement pas chaud. L’avion n’a pas de pare-brise et ses vaisseaux sanguins éclatent, dans ses lèvres et dans son nez, à cause du contact avec l’air froid.
Une fois qu’elle aperçoit le lac en forme d’huître, elle décide de tourner vers la gauche, bien qu’une vallée semble la mener à droite. Persuadée qu’elle va mourir, pour avoir écouté sans réfléchir les conseils d’une inconnue, elle se soulève par miracle juste avant de heurter la montagne et arrive dans les plaines du Chili. Par la suite, elle apprend que la jeune femme lui a été envoyée par un médium, mais déclare ne toujours pas croire aux sciences occultes.
Elle atterrit à Santiago où de nombreuses personnes s’étaient rassemblées pour célébrer son exploit. Le consul de France n’en fait pas partie, persuadé qu’il s’agit d’un poisson d’avril. Adrienne est baptisée la déesse des Andes, mais rejette cette appellation ainsi que la gloire qu’elle lui confère, persuadée que sa joie est plus importante que celle des Chiliens.
Cet exploit passe presque inaperçu en France à l’époque. Deux ans plus tard, la nouvelle épouse de Caudron, folle de jalousie, fait pression sur son mari pour qu’elle la licencie. En 1924, Adrienne est promue Chevalière de la Légion d’honneur, en reconnaissance tardive de son vol. Elle continue à piloter.
En 1930, alors qu’elle est accompagnée d’une de ses amies pour un vol initiatique près du Bourget, le moteur de l’avion tombe en panne. Alors qu’elle essaie d’atterrir en urgence, l’appareil heurte des fils télégraphiques et dévie de sa trajectoire. Adrienne parvient à se poser sur le toit d’un hangar voisin. Les deux femmes s’en sortent sans une égratignure contrairement à l’engin qui est inutilisable.
En 1930, Adrienne épouse Ernest Vinchon, un autre aviateur. N’ayant pas que des amis, à cause de sa nature combative, elle échappe de peu à la mort en 1933, prise dans un accident qui est, selon les enquêtes, le résultat d’un sabotage.
Avec Ernest, elle est très active dans les mouvements politiques de gauche, soutenant la suffragette Louise Weiss, mais également les républicains lors de la guerre civile espagnole. Ils restent en France durant la Seconde Guerre mondiale et entrent en Résistance.
Adrienne a toujours su rester humble par rapport à son exploit dans les Andes. En 1971, interrogée par un journaliste à l’occasion du 50e anniversaire de la traversée, elle déclare que cela ne l’intéresse plus, elle préfère se concentrer sur le présent que sur le passé. Elle meurt à Paris quatre ans plus tard.
Auteur : Mathilde de Jamblinne
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