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Au malheur des dames

Au malheur des dames

La satisfaction du pucelage

Obtenir le pucelage d’une fille était un événement dont les hommes s’enorgueillissaient et qui n’avait pas de raison d’être mis en doute. Jeanne Benoît, cuisinière, porta plainte en 1775 contre Georges Neveux qui l’avait engrossée. Le témoin Jean Guitard signa cette déposition le 28 août :

«Il les a souvent vu ensemble et Neveux lui a même dit qu’il avait eu son pucelage, qu’il en était si certain que lorsqu’il avait eu les premières habitudes avec elle, elle lui avait rempli sa chemise et sa culotte de sang. »

Violence entre femmes : sans intérêt

«Lundi 24 avril 1780. 10 heures du soir. Elizabeth Léonard, 37 ans, épouse de Thomas Targny, employé dans les régies du Roy, demeurant rue St. Julien le Pauvre (Paris), dépose qu’étant à souper, son mari étant au lit pour raison de maladie, elle a entendu crier et s’est mise à la fenêtre, elle a entendu qu’on disait : il faut l’amener au Châtelet, mais ayant dit à la guarde que c’était une dispute de femmes, la guarde s’est en allée. »

Assimilées aux bêtes

Les femmes accomplissaient toutes les tâches serviles que les hommes méprisaient. Elles étaient de véritables esclaves de leurs maris. Dans les Alpes, les paysans pauvres ne possédaient généralement qu’une vache et attelaient ensemble la bête et leur femme. Pour s’entraider, ils n’hésitaient pas à prêter l’une ou l’autre. À l’entrée des jardins publics, des écriteaux enjoignaient: «Ni chiens, ni filles, ni laquais, ni soldats. »

Femmes battues

Selon Nicolas Rétif, qui témoigne vers 1760, il était inconcevable qu’un époux reçoive une gifle de sa femme, qui méritait dans ce cas une bonne correction. En réalité, même si beaucoup de femmes osaient tenir tête à leurs maris, les rustres avaient la main lourde. Ils «font l’amour à coup de poing», maugréait un curé du Midi; l’un criblait sa femme de coups sans motif particulier, tel autre la battit si fort qu’il lui cassa une côte.

Entre 1789 et 1793, on cite le cas d’une «légère correction» infligée à coups de nerfs de bœuf, ou celui de tel mari délicat qui obligea sa femme à coucher par terre «parce qu’elle criait après lui », ou encore celui d’un autre qui justifia ses brutalités, sévices et jusqu’à une tentative d’assassinat, en déclarant que « quand elle faisait le lit, elle ne le faisait que de son côté ! »

À Saptes, une ouvrière qui avait volé de la laine fut fouettée au sang, marquée au fer rouge et bannie. Les délits des ouvrières étaient en effet bien plus gravement châtiés que ceux des ouvriers, alors qu’elles gagnaient deux fois moins qu’eux.

Astucieuse marchande de beignets

On racontait, au temps de Louis XV, que pour éluder l’impôt sur le sel et narguer les fermiers généraux, la marchande de marrons et de beignets du Pont-Neuf à Paris pissait dessus, car – disait-elle – ce sel là n’était assujetti à aucun droit !

Filles-mères parias

Pour éviter le scandale et une peine sévère, les filles-mères cherchaient bien souvent à éliminer leur enfant, sinon à le mettre au monde en secret. Tel le cas, en Tarentaise, de « Catherine P. », accusée d’avoir, en 1744, accouché clandestinement et enterré son bébé dans la cave de son père. Quant à Françoise Biffary, âgée de vingt ans, elle avoua au juge les moyens déployés pour se débarrasser de son bâtard :

« Dès que j’eus accouché, je pris l’enfant entre mes mains, je vis qu’il écumait par la bouche et je ne m’aperçus pas qu’il donna autre signe de vie. Je le pliai dans un tablier et je le serrai par le col, avec les attaches dudit tablier si fort qu’il en sortit du sang par la bouche. Après quoi, je le mis entre la paillasse et le matelas de mon lit, dessous le chevet. Je ne le baptisai point parce que je n’avais point d’eau, je fis un signe de croix dessus... Chez mon père, je m’étais donné de grands coups de poing contre le ventre ; il est vrai que j’ai jeûné fort longtemps et resté sans manger plusieurs fois pour affamer mon enfant et le faire mourir de faim, ayant toujours eu l’intention de le tuer ou de le mettre en cachette devant quelque maison. »

Filles de la misère

Pour une population estimée à 1200000 âmes, la capitale comptait environ 20000 péripatéticiennes, qui seraient tombées en grande majorité dans la misère totale si on leur avait supprimé cette source de revenus.

Au temps de la Révolution, la majorité des prostituées, livrées aux maquerelles, avaient entre 14 et 20 ans. Elles se pavanaient, selon un contemporain, «la gorge découverte, la tête haute, le visage enluminé, l’œil aussi hardi que les bras et qui, malgré la lumière des boutiques et des réverbères, poursuivent dans la boue, en bas de soie, les passants». Bouisses, marcheuses ou autres raccrocheuses travaillaient soit dans des chambres garnies, souvent partagées, soit dans les rues sombres, logeant dans des galetas misérables des faubourgs, voire dans des confessionnaux, attirant le client dans les jardins, quais ou recoins obscurs.

Marguerite Cousin attirait de jeunes provinciales en leur offrant une place de domestique, avant d’en exiger davantage. Ainsi, le 14 août 1790, engagea-t-elle Agathe Virton, orpheline, à condition de «se montrer complaisante vis-à-vis des hommes qui fréquentent la maison » et de « se laisser prendre par la gorge, passer la main sous les jupes et prendre sans discrétion. » Parfois, c’était le père, empêtré dans la misère, qui était l’initiateur, avec l’aval de la mère, pressée par les mioches qui réclamaient du pain.

Le sort le plus enviable était celui des prostituées entretenues par les riches fournisseurs d’armées, qui payaient 200 à 300 livres pour une nuit. Mais la plupart ne gagnaient que 3 sous à 3 livres par passe, ou bien 25 sous comme Antoinette Pouly, qui prétendait « savoir amuser deux clients à la fois ».

Loi du bien marital (1790)

«L’homme est déclaré maître absolu des biens, meubles et immeubles, crédits et actions de sa femme, encore de biens obvéans et acquis devant le mariage, et lui est permis d’en disposer [...] sans l’aveu ni consentement de sa femme». La Déclaration de Droits de l’Homme, dans laquelle notamment les citoyennes avaient placé tant d’espoirs, portait décidément bien son nom !

Mathilde

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