La plus emblématique de la perversité, la femme la plus intrigante de la Bible, car même si c’est une allégorie, elle fait remonter la conscience jusqu’à Babel et la tour de Nimrod qui défiait Dieu en voulant accéder au ciel, ceci aux origines de l’humanité, ou à Lilith, démone de la mythologie babylonienne (l’Histoire de l’Empire babylonien est brièvement relatée dans les livres des derniers prophètes) pour venir se pavaner dans le tout dernier livre de la Bible : l’Apocalypse.
Jean ne fait que reprendre l’expression du prophète Daniel qui parle de Babel la Grande, capitale des idoles et des vices.
Mais Jean est plus coloré et surtout sublime l’épouvante en décrivant une femme parée de bijoux et maquillée à outrance, livrant ses atours aux yeux gorgés de désirs insatiables de ses amants, qui en l’occurrence seraient les puissances de ce monde. Sept si on en croit l’apôtre: peut-être l’Égypte, Babylone, l’Assyrie, les Médo-Perses, la Grèce, Rome et un royaume à venir pour l’écrivain du premier siècle. Avec beaucoup d’imagination et le souci de faire coller les prophètes de l’Apocalypse avec notre époque, des millénaristes y ont d’abord vu une sorte d’empire angloaméricain. À moins que ce ne soit l’Asie, la Russie ou quelque autre encore…
Et cette salope grimpe sur le dos d’une bête abominable, qui a une apparence de félin en furie, avec sept têtes (qui représentent les sept puissances mondiales) et dix cornes… Dix rois de l’histoire de l’humanité ? Ajoutons que la « mère des prostituées » comme elle est décrite, siège sur cette bête et domine ces rois.
Et le jardin zoologique s’agrandit, avec l’arrivée d’une autre bête…
Au front, cette autre bête sauvage a une identification très hermétique: un chiffre ou un nombre: 666, qui a autorisé toutes les approximations. Souvent confondu avec le chiffre du Diable, ce que la Bible ne prétend pas, on le traduit en lettres (en grec, en araméen ou en latin) et on y retrouve le nom d’un empereur romain, Trojan, ou des dates, des lieux, des interprétations les plus diverses.
On comprend que les chrétiens aient mis des siècles pour accepter ce songe de Jean dans le canon biblique.
« Je vis surgir de la terre une autre Bête ; elle avait deux cornes comme un agneau, mais parlait comme un dragon. Au service de la première Bête, elle en établit partout le pouvoir, amenant la terre et ses habitants à adorer cette première Bête dont la plaie mortelle fut guérie. Elle accomplit partout des prodiges étonnants : jusqu’à faire descendre, aux yeux de tous, le feu du ciel sur la terre ; et, par les prodiges qu’il lui a été donné d’accomplir au service de la Bête, elle fourvoie les habitants de la terre, leur disant de dresser une image en l’honneur de cette Bête qui, frappée du glaive, a repris vie. On lui donna d’animer l’image de la Bête pour la faire parler, et de faire en sorte que fussent mis à mort tous ceux qui n’adoreraient pas l’image de la Bête. Par ses manœuvres, tous, petits et grands, riches ou pauvres, libres ou esclaves, se feront marquer sur la main droite ou sur le front, et nul ne pourra rien acheter ni vendre s’il n’est marqué au nom de la Bête ou au chiffre de son nom. C’est ici qu’il faut de la perspicacité ! Que l’homme doué d’intelligence calcule le chiffre de la Bête, c’est un chiffre d’homme : son chiffre, c’est 666. »
Apocalypse 13, 11-18.
Et Babylone ? Qui est-elle ?
On a tout dit, tout écrit.
C’est une femme de la Bible qui glace les sangs. Les chrétiens sont divisés, les millénaristes s’en donnent à cœur joie et on y voit toujours l’ennemi de sa foi: tantôt le judaïsme, tantôt le christianisme, des chrétiens y voient d’autres chrétiens considérés comme apostats, et s’il le fallait, un jour, on y verrait l’islam !
La bonne affaire !
« J’ai aperçu une femme assise sur une bête sauvage de couleur écarlate remplie de noms blasphématoires et qui avait sept têtes et dix cornes. La femme était vêtue de pourpre, parée d’or, de pierres précieuses et de perles. Elle avait à la main une coupe d’or pleine de choses immondes et des impuretés de sa fornication. Sur son front était écrit un nom, un mystère: Babylone la Grande, la mère des prostituées et des infamies de la terre. Elle était ivre du sang des saints et des disciples de Jésus. »
Apocalypse 17, 3-6.
La Bible clôture son récit en suggérant une allégorie féminine d’horreur. Une prostituée ! Ce qui résume bien ce que les femmes, si elles ne sont pas vertueuses, sacrificielles, soumises et pieuses valent dans l’esprit des rédacteurs bibliques. Elles sont saintes ou putains…
Mais au-delà du machisme ambiant, elles restent fascinantes, inoubliables, éternelles, belles et intrigantes… Inaccessibles ?