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Gino Bartali : un champion de cyclisme dans la Résistance italienne

« Le bien, c’est quelque chose que tu fais, pas quelque chose dont tu parles », lançait parfois Gino Bartali, immense champion cycliste italien décédé le 5 mai 2000, à l’âge de 85 ans. Son palmarès est long comme un jour de juin. Et, au fil de ses exploits, le Tour de France 1948, remporté 10 ans après celui de 1938, restera pour les amateurs de cyclisme un des plus beaux solstices d’été du sport.

 

 

Sans la Seconde Guerre mon­diale, d’autres Grandes Boucles figureraient au palmarès de ce champion né à Ponte a Ema dans la banlieue de Florence, le 18 juillet 1914. Les déflagrations planétaires marquèrent son exis­tence au fer rouge. Le régime fasciste tenta vainement d’exploi­ter son énorme popularité. Bartali précisa plus tard : « En 1938, j’ai gagné le Tour de France pour le Pape, pas pour Mussolini. » Et il y avait quelques secrets longtemps bien gardés derrière ces mots directs. Ils dissimulèrent des exploits qui furent finale­ment plus marquants que ses trois Tours d’Italie (1936, 1937, 1946), ses deux Tours de France (1938, 1948), ses trois Tours de Lombardie (1936, 1939, 1940), ses quatre titres de Cham­pion d’Italie sur la route (1935, 1937, 1940,1952), ses quatre Milan-Sanremo (1939, 1940, 1947, 1950), etc.

 

 

Au début des années 40, la folie des hommes plongea le monde entier dans le deuil. Mobilisé, chargé de la surveillance des voies ferrées, Bartali sera finalement affecté à la police de la route. Sur cette lancée, il reprit son vélo pour s’entraîner et préparer les quelques courses encore organisées. Bartali se fit alors un plaisir de pédaler de Florence à Assise, à Gênes ou à des villages reculés des Abruzzes. Les paysans le reconnaissaient, l’encourageaient, le ravitaillaient. À l’occasion, dit-on, le champion italien buvait un verre de chianti, appréciait une cigarette avec eux. Le tabac, selon ses dires, lui était nécessaire pour « donner du rythme à un coeur un peu trop lent ». En course, d’ailleurs, il lui ar­riva de griller une cibiche au sommet d’un col en attendant ses adversaires, laminés par ses attaques. Mais, là, que faisait-il, que disait-il, en partageant des clopes avec des paysans de San Quinto, près d’Assise ?

 

 

Personne ne le savait, même pas sa femme Adriana, et il fallait que le secret soit bien gardé. Il avait déjà nargué le régime fasciste en prenant la défense d’un coureur, Giovanni Valetti, connu pour ses opinions de gauche et jeté dans les geôles de la dictature mussolinienne. Bartali remua ciel et terre pour que Valetti retrouve le parfum de l’air libre. Bartali n’en parla jamais et, bien plus tard, c’est Valetti en personne qui révéla tout ce que son sauveur avait fait pour lui. Le jeu était encore plus dangereux dans ses sorties d’entraîne­ment frisant parfois les 300 km. Membre du réseau de résis­tance Desalem, il transportait des documents, papiers d’iden­tité et photos, entre autres, soigneusement dissimulés dans la tige de selle, le guidon et le cadre de son vélo. La police l’arrêtait parfois... pour lui demander des autographes.

 

 

En 1943, l’étau se resserra autour de lui et, en raison de ses relations avec le Vatican, il se retrouva en prison durant quarante-cinq jours. À peine, libéré, il reprit son travail de pas­seur de documents, de courrier cycliste filant au péril de sa vie d’une église à un couvent, lieux de rendez-vous des maquisards. Il portait déjà le surnom de Gino-le-Pieux. Son frère, Giulio, coureur cycliste comme lui, se tua en compétition. Bartali ne s’en remit jamais et trouva un peu de réconfort dans la prière. Certains osèrent cependant affirmer qu’il ne se signait qu’en présence des photographes de presse, histoire de soigner son image de bon catholique.

 

Gino Bartali en 1952

 

Au fil des années de guerre, tout en égrenant des milliers de kilomètres pour s’entraîner, Bartali apporta une contribution décisive au sauvetage de huit cents Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. S’il adorait évoquer ses grandes victoires sportives et ses inoubliables duels lancés à Fausto Coppi, Bar­tali ne pipa jamais mot à propos de toutes ces courses secrètes, plus dangereuses les unes que les autres, disputées au péril de sa vie, qui furent autant de bouées de sauvetage. En septembre 2013, Bartali a reçu, à titre posthume, la plus grande distinc­tion octroyée par l’État israélien : « Juste parmi les nations ».

 

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Louise

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