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Des seigneurs aux manières de vauriens

Le mythe du chevalier courtois appartient à la littérature. Les seigneurs étaient en fait le plus souvent rustres et violents. Pour se procurer de l’argent, beaucoup recouraient au brigandage, pillant et détroussant marchands ou pèlerins à proximité de leur château. 

En témoigne notamment, au temps de Louis VI le Gros (1108- 1137), le comportement de Thomas de Marle, seigneur de Coucy. Selon Guillaume de Nogent et Suger, « pour obtenir une rançon de ses captifs, il les suspendait par quelque endroit sensible de leur corps ou bien il les couchait par terre, et les couvrait de pierres ; il marchait sur eux, les frappant en même temps jusqu’à ce qu’ils eussent promis tout ce qu’il demandait ou fussent morts à la peine… » 

En 1111, le comte de Flandre Baudouin – vassal du roi de France – décida de prendre des mesures exemplaires à l’égard des chevaliers qui se livraient à des pillages lors des foires. Sur la place du Marché de Bruges, il en fit bouillir un et en pendre dix autres. 

Sous le règne de Philippe Auguste, le réquisitoire dressé par des moines du Roussillon contre un seigneur de leur voisinage est tout aussi révélateur : 

« Il a fracturé notre enclos et s’est emparé de onze vaches. Une nuit, il a pénétré dans notre propriété et a coupé nos arbres fruitiers. Le lendemain, il a saisi et attaché dans un bois deux de nos serviteurs et leur a enlevé trois sous d’or et six deniers. Le même jour, il a pris une tunique, des pantalons et des souliers à un fermier. Une autre fois, il a tué deux vaches et en a blessé quatre dans la ferme de Col-de-Jou et en a enlevés tous les fromages qu’il a trouvés. Un autre jour, il a pris cent cinquante moutons, un âne et trois enfants qu’il n’a voulu lâcher que moyennant cent sous. Il a saisi ensuite deux hommes dont il a fixé la rançon à cent sous et l’un d’eux est encore captif… » 

À la même époque, un seigneur du Périgord fit couper, dans un couvent de Sarlat, les pieds et les mains ou encore crever les yeux à cent cinquante personnes, tandis que sa femme faisait arracher les seins et les ongles à de pauvres paysannes. 

La pratique de la vengeance privée étant bien ancrée, ne pas laver l’affront fait à l’un des siens était déshonorant. D’où un état permanent de troubles, de rixes incessantes, de lutte à main armée, non seulement entre nobles, mais entre gens de toutes conditions. 

Mathilde

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