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Frédégonde, reine vengeresse

L’histoire de Frédégonde commence au VIe siècle à la mort du roi des Francs Clotaire Ier, lorsque les quatre fils du souverain déposent la dépouille mortuaire de leur père dans la basilique de Soissons et, très vite, se lancent dans le partage de leur héritage commun.

Le royaume mérovingien fondé par le très chrétien Clovis Ier se trouve alors dépecé par ses descendants. Chacun récupère son nouveau fief, que le sort lui a désigné. Ce sera Paris pour Caribert, qui va mourir à peine quelques années plus tard, Gontran héritera d’Orléans, Chilpéric de Soissons et Sigebert de Metz. À la mort de Caribert en 567, ce dernier n’ayant aucun héritier mâle, Paris est divisé entre ses trois frères. Mais aucun n’a le droit de s’approprier le fief sans l’accord des deux autres.

Chilpéric Ier, régnant donc à Soissons, possède un harem de concubines, mais est néanmoins marié légitimement à Audovère, dont le destin est tragique. Première femme de Chilpéric, elle est supplantée par l’une de ses servantes, Frédégonde, qui, une fois devenue la maîtresse du roi, obtient de lui qu’il la répudie, mais de façon, pour l’instant, non officielle.

L’Église contrarie Chilpéric, en lui refusant tout d’abord le mariage avec cette femme qui ne descend que d’une pauvre famille de serfs : l’institution a eu tort, car il n’est pas bon de s’opposer au souverain. Frédégonde deviendra sa reine, quoi qu’il advienne. Sigebert, un des autres fils de Clotaire Ier, lui-même fils de Clovis, décide alors de sauver l’honneur de la race et plutôt que d’épouser, comme son frère, une servante vorace, il épouse une femme de sang royal et décide, nouveauté incroyable à l’époque, de se contenter de cette seule épouse. Brunehaut, fille du roi wisigoth Athanagild, devient la conjointe de Sigebert. Les noces sont célébrées à Metz avec grand éclat, vaisselle d’or et d’argent, coupes ornées de pierreries, et une cohue d’invités prestigieux : orgueilleux seigneurs francs et nobles Gaulois sont de la fête, ainsi que des ducs germains vêtus de leurs vêtements de fourrures.

Les frères royaux entrent alors en compétition : Brunehaut est certes d’une beauté égale à celle de Frédégonde, mais est plus raffinée. Vingt-cinq ans, une taille élégante, des mœurs honnêtes, sage dans sa conduite et agréable dans sa conversation… Tout ce qu’il faut pour effacer ses rivales.

Chilpéric, face à cette sublime reine, décide qu’il est bon d’épouser, à son tour, une princesse de sang royal et c’est ainsi qu’il s’unit à la sœur de Brunehaut, la princesse Galswinthe.
À sa demande, le roi wisigoth hésite, connaissant la réputation du roi des Francs saliens, et désirant pour sa fille aînée un mari aussi aimant que celui de Brunehaut. Chilpéric, pour que sa demande aboutisse, promet de répudier sa femme et de congédier son harem. Athanagild cède et sa fille est sacrifiée.
Le souverain de Neustrie tient parole, disperse ses concubines avant de répudier définitivement Audovère et prend ses distances avec sa maîtresse Frédégonde, la gardant cependant auprès de lui au palais. Néanmoins, la nuit de noces du roi en compagnie de la belle Galswinthe est brève : il trouve en effet que sa nouvelle épouse possède des qualités un peu trop spirituelles à son goût et son caractère lui déplaît. Frédégonde, satisfaite, attend donc patiemment que Chilpéric revienne vers elle : elle a vu clair et sait que le roi ne peut se passer d’elle. Mais, le temps passant, Galswinthe devient gênante. En effet, la princesse wisigothe n’est toujours pas enceinte et, comme son époux fréquente de nouveau son harem, elle crie à l’injure faite à son honneur. Le roi ne sait que faire : faut-il la renvoyer à ses parents ? Ce serait une mauvaise opération financière, car ils réclameraient le retour de la précieuse dot !

L’astucieuse maîtresse souffle une solution plus radicale à l’oreille de son royal amant. Et voilà qu’un beau matin, un an après son mariage, on trouve la pauvre Galswinthe morte dans son lit, étranglée par un fidèle compagnon de Chilpéric.

Quelques jours plus tard, Frédégonde reprend son titre de maîtresse officielle et en profite pour s’octroyer celui de reine au royaume de Neustrie. Brunehaut, apprenant l’assassinat de sa sœur, donne l’ordre à son époux Sigebert de venger son honneur et de déclarer la guerre à Chilpéric. Une guerre fratricide éclate et, entre Brunehaut et Frédégonde, un combat sans pitié est désormais déclaré.

À Vitry-sur-Scarpe, Frédégonde célèbre sa première victoire. Tournai est assiégée et elle se trouve enfermée avec son époux Chilpéric et ses enfants. Sigebert s’apprête à être reconnu comme roi, mais est immédiatement transpercé de deux coups de poignard dans les flancs, par deux esclaves envoyés par la terrible reine.

Brunehaut réussit à sauver son fils, le petit Childebert, qui, dans un panier, est amené par une escorte à Metz. Chilpéric arrive en toute hâte au palais de la cité pour prendre possession de sa belle-sœur et de ses trésors. Pour son malheur, ce jour-là, il est accompagné de son fils Mérovée, issu de sa précédente union avec Audovère. Le jeune homme est un véritable Apollon, qui a un succès fou auprès des dames de la cour, et doté une nature ardente. Évidemment, à la seule vue de sa tante Brunehaut, dont la colère la rend plus belle que jamais… C’est le coup de foudre. Chilpéric, son père, ne se rend compte de rien, et envoie alors Brunehaut en captivité à Rouen.

Mérovée s’empresse d’aller la retrouver afin de filer le parfait amour avec cette tante, qui a trente ans quand lui n’en a pas encore vingt. Elle s’enflamme à son tour, sans doute plus par esprit de vengeance que par réelle passion, et très vite, l’évêque de Rouen unit les deux amoureux par les liens du mariage.

C’est la consternation à la cour de Chilpéric : pour lui faire payer cet affront, il décide de faire tondre son fils Mérovée et de le faire enfermer dans un couvent en Touraine. Mérovée ne supporte pas cette punition, qui plus est venant de son propre père, et s’échappe du monastère pour se cacher dans une ferme en Picardie. Puis, fou de rage, il demande à son fidèle compagnon Gaïlien de poignarder le roi de Neustrie. Gaïlien échoue et, sur l’ordre de Frédégonde, l’ami de Mérovée perd ses pieds, ses mains, son nez et ses oreilles, puis la vie suite à ces atroces tortures. Mérovée lui-même paie l’humiliation qu’il a infligée à son père : le voilà lui aussi poignardé. Clovis, le dernier fils de Chilpéric et d’Audovère, emprisonné, est également assassiné dans sa cellule. Quelques jours plus tard, Frédégonde et sa meute d’assassins vont exterminer la première épouse de Chilpéric, confinée depuis quinze ans
dans un couvent. Malheureusement pour Audovère, il ne suffisait pas à sa suivante assoiffée de pouvoir qu’elle soit rejetée. Elle finit donc ses jours étranglée, en 580.

Frédégonde devient, finalement, régente du royaume de Neustrie : ses folles tentatives et manoeuvres pour accéder au pouvoir ont abouti. Elle meurt paisiblement dans son lit à
l’âge de cinquante-sept ans. Sa rivale de toujours, Brunehaut, a moins de chance, et, écartée du palais de Metz, elle s’est réfugiée chez Thierry II, roi de Bourgogne. Suprême imprudence, sans doute dans un ultime espoir de vengeance, Brunehaut veut s’attaquer à son neveu Clotaire II, fils de Frédégonde, devenu Roi des Francs. Mais, trahie et livrée à son ennemi, Brunehaut connaît une fin atroce. Ainsi, pendant trois jours, le roi Clotaire II fait subir à cette femme, pourtant âgée de soixante-dix ans, les pires tortures. Il la fait attacher par sa chevelure, par un pied et un bras, à la queue d’un cheval très fougueux de façon à ce que tous ses membres soient brisés par les ruades du cheval et la rapidité de sa course. L’an 613 sonne le glas du règne de Brunehaut, et l’avènement de la descendance de Frédégonde au trône de Francie.

Mathilde

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