Les propos du professeur Thalamas, cet enseignant qui a ouvertement critiqué les actions de Jeanne d’Arc dans sa salle de classe, n’en finissent plus de retentir sur la politique française. C’est à ce sujet que MM. Déroulède et Jaurès se sont, par presse interposée, échangé des amabilités. Brocardé dans les colonnes de l’Humanité (le journal de Jaurès), l’écrivain nationaliste, qui se réclame du mythe de Jeanne d’Arc, a répondu en ces mots : Je vous tiens, vous, Monsieur Jaurès, pour le plus odieux pervertisseur de conscience qui ait jamais fait, en France, le jeu de l’étranger.
Lisant ces propos, le sang de Jaurès ne fait qu’un tour : tout pacifiste qu’il est, le voilà qui défie son adversaire en combat singulier ! Mais comment s’y prendre ? Déroulède est exilé en Espagne, laquelle refuse catégoriquement que l’échange ait lieu sur son sol. Quant à la loi française, elle prescrit aussi bien le duel que la présence de Paul Déroulède dans ses frontières. Ivre de vengeance, Jaurès n’hésite pas à s’affranchir de la légalité. Le 6 décembre 1904, c’est donc au mépris des lois que ces Messieurs se retrouvent à Hendaye, sur la frontière franco-espagnole. Deux tirs sont échangés. Fort heureusement, ils ne feront aucun blessé.