Les descendants de Clovis, appelés traditionnellement « Mérovingiens », régnèrent jusqu'en 752. De 511 à 639, ils ne furent que des chefs de bandes dirigeant tant bien que mal une société anarchique et violente, déchirée par la guerre. Après la mort de Dagobert (639), leur titre de roi n'était plus que théorique. Le pouvoir des rois dits « fainéants », c'est-à-dire dégénérés, à la suite de mariages consanguins, était en fait exercé par les « maires du palais », originaires des régions mosanes, qui préparèrent l'avènement de la dynastie des Carolingiens. L'histoire de cette période confuse est mal connue.
Pas de quoi pavoiser
Tout le monde a appris à l'école que les rois francs, une fois qu'ils étaient élus par acclamation, étaient « hissés sur le pavois ». Cette expression, inventée par les historiens du XIXe siècle, est un anachronisme puisque le pavois était un bouclier fabriqué à Pavie vers le XIVe siècle, donc inconnu à l'époque mérovingienne. Elle évoque en fait une coutume plus ancienne : l'histoire du Bas-Empire romain foisonne de généraux proclamés imperators par leurs soldats, portés en triomphe sur le scutum avant d'être, peu après, chassés du pouvoir par un concurrent.
Femmes à poigne
Après la mort de Clovis, en 511, et des partages successifs, se formèrent trois royaumes mérovingiens distincts : l'Austrasie, la Neustrie et la Bourgogne, aux frontières aussi floues que fluctuantes.
L'un des petits-fils de Clovis, fils de Thierry Ier, Théodebert, roi d'Austrasie et d'Auvergne (533-548), avait pris pour concubine une matrone romaine de Béziers, Déoterie, qui avait une fille de son premier mariage. Quand elle devint grande et belle, sa mère eut peur de perdre les faveurs du roi, au profit de son enfant. Aussi la plaça-t-elle dans un char à bœufs qu'elle fit précipiter dans la Meuse, à Verdun.
En 558, à la suite de la mort de tous ses frères et neveux, Clotaire devint l'héritier unique du territoire franc. À son décès, en 561, le royaume fut à nouveau divisé. Parmi ses fils, Sigebert devint roi d'Austrasie et Chilpéric, roi de Neustrie. Aux guerres de conquête et de pillage succédèrent alors, jusqu'en 613, des guerres civiles sur un territoire éclaté.
Une certaine Frédégonde, ancienne servante, vulgaire et cruelle, porta une large part de responsabilité dans la sanglante querelle familiale qui déchira l'héritage de Clovis. Elle fut d'abord la maîtresse de Chilpéric Ier, dès 567. À en croire le chroniqueur Grégoire de Tours, celui-ci était un barbare glouton et despotique qui faisait crever les yeux de ceux qui osaient lui résister. Mais il fut aussi bienfaiteur de l'Église et se montra érudit à ses heures : il imagina d'ajouter quatre nouvelles lettres à l'alphabet, écrivit des poèmes et un traité de théologie hostile au dogme de la Trinité. Trois était aussi le nombre de ses épouses successives. En 568, sa concubine Frédégonde réussit à le convaincre de trucider la seconde, Galswinthe, fille d'Athanagild, roi des Wisigoths d'Espagne. Chilpéric la fit égorger dans son lit par un esclave après que, fatiguée par la brutalité de son époux, elle voulut rentrer chez son père. Une dizaine d'années après avoir épousé Chilpéric, Frédégonde commandita l'assassinat de sa première femme, Audovère, répudiée depuis 565, ainsi que celui de ses deux fils, Clovis et Mérovée, de manière à réserver la succession du trône à l'un de ses propres fils. À la mort de son mari, assassiné à Chelles (Seine-et-Marne) en septembre 584, elle exerça sa tutelle sur le royaume au nom de leur fils Clotaire, alors seulement âgé de quatre mois, qui devint roi sous le nom de Clotaire II, l'un des plus grands souverains de la dynastie mérovingienne.