Lilith, la première femme d’Adam

LILITH

Prétendument créée en 4000 avant J-C.  Évoquée par des rabbins vers 500 avant J-C.

Lieu : Jardin d’Éden (Mésopotamie)

Particularité : Personnage mythologique féminin apparaissant peut-être sur la première rédaction avérée du récit biblique, à Babylone. Elle sera très vite associée à la mythologie démoniaque. Elle pourrait aussi, selon certaines sources non concordantes, être de race noire.

Si on accorde crédit au récit de la création d’Ève, on ne peut balayer d’un revers de la main l’apparition dans les premiers textes écrits de la Bible d’une différenciation entre une première évocation de la création de l’homme « et » de la femme à partir du limon et une deuxième, l’épisode de la création d’Ève, à partir d’une côte d’Adam. D’abord, le récit biblique dit en évoquant Adam et Ève : « Il (Dieu) les créa à l’image de Dieu, mâle et femelle » selon le livre de la Genèse (1,27). Une tradition rabbinique (Talmud) souligne que ce n’est qu’après (Genèse 2,21-23) que Dieu prit, dans son sommeil, une côte à Adam pour en faire une femme. Ce dernier, au réveil, déclara selon la Bible : « Celle-ci est “enfin” (ou : “cette fois-ci”) l’os de mes os et la chair de ma chair ». Certains y verront une allusion au défilé des animaux devant Adam, qui n’y aurait pas trouvé compagne. Cette vision d’une rare stupidité supposerait qu’Adam ait pu trouver une compagne parmi les primates, les bovins ou les félins ? Cet « enfin » voudrait-il signifier qu’Adam n’était pas tout à fait satisfait de la première créature féminine que Dieu lui aurait proposée : Lilith ?

Cette ouverture à une légende talmudique (le Talmud est une étude de la Loi par des rabbins – il y en a deux : celui de Jérusalem et celui de Babylone) de Lilith, qui, elle, aurait été créée en même temps qu’Adam (unie à lui par le dos) alors qu’Ève aurait été tirée plus tard du corps d’Adam préface plusieurs polémiques : la première, Lilith, n’aurait pas convenu à Adam ? Pourquoi ? La couleur de sa peau ? Une trop facile sinon opportuniste répugnance raciale peu crédible à ce stade de l’histoire du monde. Pour son caractère ? Là aussi est née la légende d’une femme révoltée contre l’autorité de l’homme et ensuite pourchassée par les anges pour devenir un démon. C’est ainsi qu’elle aurait disparu de la vie terrestre.

Lilith entre Adam et Ève, trumeau de Notre-Dame ©DR

La Bible (sauf certaines versions hébraïques) ne mentionne pas le nom de Lilith. Il s’agit d’une conclusion de rabbins, probablement due à une superstition babylonienne. La Bible fut rédigée à cette période de l’Antiquité, sous la plume d’Esdras, au milieu du Ve siècle avant J-C.  On ne peut négliger que Lilith put davantage être issue des croyances babyloniennes que judaïques.

Mais, comme souvent les légendes ne naissent pas du néant, il faut souligner qu’elle est nommée dans les poèmes liés à Gilgamesh, qu’elle est adorée comme une déesse par les Assyriens et que son nom est traduit (Isaïe 34,14) par Lamia (ou Leila) dès la Vulgate latine (traduction tardive des écrits hébreux, araméens et grecs).

Dans le Talmud et la littérature midrashique, Lilith couche avec Adam, avant qu’Ève ne soit créée. Lilith engendre des démons et des démones qui peupleront le monde parallèle des humains. Représentée comme une créature ailée à la longue chevelure, elle serait une tentatrice perverse qui viendrait dans la couche d’hommes seuls et se ferait saillir par ces mâles sans même qu’ils le sachent.

Richard Westall – Faust & Lilith (Domaine public)

Elle accoucherait d’une relation mixte démone-homme d’êtres mi-démons mi-humains, vivant entre le monde des terrestres et un univers plus éthérique, aux frontières du Ciel. Le mot hébreu pour ces créatures est Nephilim (démons du genre humain).

Si cette version peut paraître fantasmagorique, n’oublions pas que, selon la Bible chrétienne, de leur côté, les anges de Dieu, peu avant le déluge, eurent envie de coucher avec les filles des hommes et vinrent pour ce faire les engrosser d’êtres vaillants qui seront appelés les Nephilim, doués d’une force surhumaine.

Perçue comme un être vicieux et rebelle, Lilith aurait une origine biblique sans que son nom ne soit jamais orthographié Lilith dans les textes grecs et latins. Il est curieux que ce personnage si aisément reconnu par des juifs ne soit plus du tout mentionné après les traductions des textes hébreux en grec. Elle n’est pourtant pas plus incroyable qu’une créature (Ève) « à partir d’une côte d’Adam » ou de vies ambivalentes d’êtres métissés d’entités spirituelles et d’humains (les Nephilim).

Lilith serait identifiable à plusieurs reprises dans le récit biblique.

En parlant du désert que deviendra Edom, Isaïe écrit :

« Là où les chats sauvages rencontreront les hyènes et que les satyres s’y appelleront, là se tapira “le démon en forme de bouc” (Lilith), pour y trouver le calme ».

Isaïe 34,14.

À noter que ce texte, traduit en français de la Bible judaïque, mentionne nommément le nom de Lilith, alors que les traductions suivies par les chrétiens ont gommé ce prénom pour écrire « le démon en forme de bouc », représentation traditionnelle de Lilith dans la mythologie démoniaque.

Ou encore, suggéré par Job :

« On arrache le méchant de sa tente pour le traîner devant le Roi des Frayeurs (Lilith y…) (là où…) souffle le soufre sur son bercail. »

Job 18,15

Et les Psaumes de conclure :

« Tu ne craindras ni la terreur de la nuit (Lilith), ni la flèche qui vole de jour, ni Deber (un démon), ni la peste qui marche dans les ténèbres, ni Keteb (un démon), le fléau qui dévaste tout à midi. »

Psaumes 91,5.

Figure de proue de certains mouvements féministes et homosexuels, elle est envoûtante, sexuelle, bestiale et sans tabou, ce qui la rend désirable aussi des hommes qu’elle domine par des assouvissements pervers de désirs inavouables. La domination des hommes, la bisexualité, le sang répandu, la sodomie et la mort sont ses assouvissements. Un régal…

Hugo, Baudelaire, Anatole France fantasment sur cette insatiable succube qui tue les hommes dans l’acte sexuel et donne naissance par un hymen bien mystérieux à des femmes immortelles.

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