Qui se souvient de Nicole Mangin ? Personne ou presque. Pourtant, elle fut, grâce aux hasards de la vie et à son caractère d’acier trempé, une figure de la Grande Guerre. Aux salons et à la vie mondaine auxquels elle pouvait aspirer, cette femme d’exception préfère l’action. Elle va se retrouver au cœur de la Grande Guerre. Sous les bombardements et les sarcasmes de ses collègues masculins, elle se donnera corps et âme à la médecine au cœur de la bataille de Verdun.
Son biographe, le docteur Jean-Jacques Schneider, la sort de l’oubli en 2011. S’il situe sa naissance en 1878, boulevard de Strasbourg à Paris, à deux pas de la gare de l’Est, les familles maternelle et paternelle de Nicole Mangin sont ancrées en Meuse et plus particulièrement dans le petit village de Véry en Argonne.
Aînée de trois frères, Nicole Mangin présente un caractère bien trempé, plein d’allant et d’initiatives. Elle s’avère féministe et ressent le besoin de venir en aide à ses semblables nécessiteux, souligne Jean-Jacques Schneider dans la présentation qu’il en fait pour une exposition dans la chapelle de l’ossuaire de Douaumont. Des objets appartenant à sa famille et offerts par des soldats blessés avaient été exposés pour l’occasion.
Nicole Mangin donne un cours de vaccination aux infirmières de son hôpital, en 1918.
Entrée en 1896 à la faculté de médecine de Paris (la chose est extrêmement rare pour une femme à cette époque), elle est admise en 1899 à l’externat des hôpitaux de Paris. 1899, c’est aussi l’année de son mariage avec André Girard, gros négociant en vins pétillants. Ses études s’arrêtent. Un fils, Étienne, naît de cette union. Mais, bien vite, la passion s’étiole et le couple divorce en 1903. Nicole Mangin reprend alors ses études. La tuberculose et le cancer sont ses sujets de prédilection. Elle fera, de cette dernière maladie, l’objet de sa thèse de médecine. Praticienne hospitalière, elle poursuit ses recherches.
Et c’est par le plus grand des hasards qu’elle va se retrouver dans la tourmente de la Première Guerre mondiale. Le 2 août 1914, elle est mobilisée… par erreur. Elle se rend tout de même à l’hôpital thermal de Bourbonne-les-Bains, lieu de son affectation. La surprise est grande quand on découvre qu’elle est une femme, mais elle tient bon. Elle est nommée médecin auxiliaire puis médecin-major à l’exemple de ses confrères masculins. Elle ne servira jamais en premières lignes, mais dans différents hôpitaux militaires exposés au feu, car proches du front et sera la seule doctoresse française à porter l’uniforme au cours de la guerre. Fin 1914, elle est mutée dans un secteur réputé calme : Verdun ! Elle sillonne alors le secteur : le fort de La Chaume, Dugny, Vadelaincourt, Vacherauville avant d’être nommée à l’hôpital n°13 de Glorieux à Verdun, c’est à ce poste que la surprend l’offensive allemande du 21 février 1916. Elle pratique la chirurgie dans les hôpitaux de Dugny, Vadelaincourt et de Queue-de-Mala. Elle est légèrement blessée au visage alors qu’elle évacue des blessés à bord d’une voiture sanitaire, au niveau de Fleury.
En octobre 1916, conscient de ses capacités, le Commandement lui confie la direction de l’hôpital-école pour infirmières Édith-Cavell à Paris. Jusqu’en 1919, elle forme et traite sans relâche des patients atteints de la grippe espagnole.
Le 6 juin 1919, le corps de Nicole Mangin est retrouvé sans vie dans son appartement du 176 boulevard Saint-Germain. Peut-être victime de surmenage, à 41 ans, elle aurait décidé d’en finir avec la vie. Athée, les obsèques sont civiles et sa crémation a lieu au Père-Lachaise avant l’inhumation de ses cendres dans la tombe familiale à Saint-Maur-des-Fossés. Elle n’a reçu ni citation ni décoration…