Des Allemands dépassés
Les premiers chocs avec les T-34 et les KV-1 soviétiques, lors de l’opération Barbarossa, amenèrent les forces allemandes à constater que leurs Panzers III et IV étaient désuets face à des engins plus rapides, mieux armés et mieux protégés.
Hitler lança alors de nouveaux projets de chars pour faire pencher à nouveau "la balance des forces" en sa faveur.
La course à la grandeur
Les Allemands conçurent de nouveaux tanks plus gros et plus lourds que leurs prédécesseurs, revêtus d’une armure plus épaisse et utilisant des canons antichars de plus gros calibre, et donc plus efficaces. Les noms de ces chars emblématiques que furent les Tigres 1 et 2 ou encore le Panther ont marqué autant les mémoires que les champs de bataille.
Hitler, avec sa fascination pour les « Wunderwaffe » (les armes miracles), était toujours à la recherche du prochain grand pas à effectuer, ce qui signifiait construire des chars toujours plus gros avec une plus grande puissance de feu. Cette obsession pour les chars lourds fut influencée par son expérience de soldat d’infanterie dans les tranchées de la Première Guerre mondiale. Elle allait le mener à la création du plus grand et du plus gros tank jamais construit : le Maus, du célèbre Ferdinand Porsche, déjà connu pour sa Volkswagen.
La souris monstrueuse
Porsche avait joué avec les obsessions d’Hitler en présentant, en juin 1942, le projet du VK100 Porsche Type 205 : un tank hors norme par sa taille et son poids, beaucoup plus grand que tout ce qui avait été conçu précédemment. Hitler approuva ce projet fou avec enthousiasme et exigea qu’un prototype soit produit et présenté dans les plus brefs délais.
Le Maus pesait plus de 180 tonnes (contre les 70 tonnes du Tigre 2, qui était déjà un monstre) pour une hauteur de presque 4 m et une longueur de 10 m. Il possédait aussi une armure qui, à certains endroits, atteignait 250 mm, ce qui à l’époque était impénétrable par les canons alliés. Son armement principal était prodigieux, composé non pas d’un seul, mais de deux principaux canons, un de 128 mm et l’autre de 75 mm. Un monstre purement et simplement, censé répandre la peur et la mort par sa seule présence sur le champ de bataille.
À l’origine, l’engin devait s’appeler Mammut ou Mammoth, mais peut-être par humour ou ironie, il a été renommé Mäuschen (Petite Souris) puis, plus simplement, Maus. Lorsque le prototype a été produit, seul le nom de Maus est resté.
« Pas vraiment concluant »
La première version du Maus était équipée d’un moteur conventionnel, jouant le rôle de générateur, qui alimentait deux moteurs électriques, chacun actionnant une chenille. Cette technologie était révolutionnaire pour l’époque et Porsche s’efforçait de l’utiliser au mieux, mais elle montra vite ses limites, surtout pour un monstre pareil. La vitesse du Maus ne dépassait pas les 10 km/h en tout terrain et 20 km/h sur route et sa consommation de carburant était de 3 000 à 4 000 litres pour 100 km.
La deuxième version fut équipée d’un moteur diesel, mais cela ne changea pas significativement ses performances.
Ces problèmes de mobilité auraient réduit drastiquement les fonctions offensives du char, mais, en revanche, il aurait pu rester un engin meurtrier de défense. Cependant, sa faible mobilité l’aurait rendu très vulnérable aux attaques aériennes. Il était également devenu clair que le Maus impliquerait de nombreux problèmes logistiques dus à son poids, que peu de ponts ou de terrains pouvaient supporter. De plus, son acheminement par vois ferrées demandait des wagons spéciaux.
Seul un exemplaire reçut une tourelle et accéda à un stade de tests avancés.
L’arrivée des Russes en Allemagne mit fin aux tests des prototypes et à la production du char. Les Allemands dynamitèrent les quelques exemplaires existants quand l’Armée rouge prit le complexe de Kummersdorf.
Avec les restes des exemplaires en construction, les Soviétiques parvinrent à reconstruire un Maus fonctionnel et l’emmenèrent à Koubinka pour des tests. Ils finirent, eux aussi, par abandonner ce projet.
Même si certaines rumeurs racontent que le Maus aurait été utilisé lors de la défense de Berlin, en avril 1945, il n’y eut aucun témoignage fiable pour le confirmer. D’autant plus qu’il parait peu probable qu’on ait pu acheminer pareil engin à Berlin alors que les vois ferrées avaient été détruites par les Alliés.
Un seul exemplaire est encore visible en Russie au musée des blindés de Koubinka